Solidarisant et repoussant à ses périphéries l’espace peint, le « pliage pour méthode » expérimenté par Simon Hantaï à partir des années 1960 ouvre une réserve. Morceau de toile laissée vierge car dérobée au flux de la couleur, cette contre-forme invoquée par de nombreux et précis commentateurs, dont Marcelin Pleynet dans un texte important de 1981, comme permettant d’aborder cette œuvre par le blanc du non-peint.

Dans les quelques Tabulas réunis à la galerie Jean Fournier, le nom générique des œuvres correspond à une période marquée notamment par la réalisation de toiles régulièrement quadrillées et s’étalant de 1972 à 1982, année où Hantaï annonce son arrêt de la peinture. Trois grands formats présentent ainsi des variations de cette grille matricielle en épargne découpant et distribuant la répétition de carrés de peinture. Tout comme dans les plus petits formats présentés, dont le pliage constitutif est moins générique, donnant lieu à des formes uniques ou doubles, parfois polychrome, le dépli et l’enchâssement de la toile ne vaut pas une stricte mise à plat. En effet, le prolongement des stries du pliage et des ressacs de la toile par les veinures et l’intensité du maculage de la couleur donne relief à ces tableaux: ce registre du drapé se rejoue dans les nuances des teintes picturales comme dans l’entame, voire l’ensemencement, du peint et du non-peint l’un par l’autre. À propos du volume – là encore en réserve dans les tableaux –, Simon Hantaï avait pu ainsi affirmer qu’il lui fallait « se mettre dans la toile », comme s'il voulait endosser et faire corps avec la peinture.

Tom Laurent

Site de l'exposition