À l’âge du numérique, alors que l’œuvre d’art est susceptible d’être multipliée, téléchargée et communiquée à tous, en tout lieu et à tout instant, Astrid de La Forest pratique le seul type de gravure qui s’oppose farouchement à la répétabilité pour demeurer unique : le monotype. Comme s’il fallait conjurer le flot ininterrompu de l’internet par un arrêt du temps, qui ne soit pas arrêt sur image mais arrêt sur apparition. Déclarant cet espace fantôme en mouchant ou tamponnant la lumière avec ses monotypes à la fin du XIXe siècle, Degas noyait son dessin dans l’encre noire de nus floutés. Usant de cette technique de flaque sur métal, entre la trace de ski sur neige fraîche et le brouillage électronique, Astrid de La Forest dilue à son tour les hautes parois montagneuses qui entourent le lac Léman dans de puissantes et verticales symphonies alpestres.

Extrait de l'article d'Emmanuel Daydé publié dans le N°57 de la revue Art Absolument: parution le 10 janvier 2014

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